DE KIFT
7 - CD
V2 records 2006
Range Ta Chambre/Anticraft 2007

Vous m'accorderez bien cette danse ? C'est reparti pour un pas de deux dont le chiffre sept brille au milieu de la piste. Sept comme le nombre d'albums sortis par l'orchestre hollandais en dix-sept années d'existence. Chiffre dont on vante la perfection et la plénitude spirituelle… C'est pour l'instant le chiffre d'une première. Depuis le temps que la troupe fait ses représentations sous les chapiteaux français et développe de fortes amitiés, cet album sort en deux versions. La version originale. C'était pour 2006. Et la version française toute fraîche dont l'association rennaise Range ta Chambre est l'initiatrice. Les quinze morceaux traduits dans la langue de Molière pour des textes à l'origine russes pour la plupart. Un beau tour de passe-passe où ces poèmes russes plus que centenaires pour certains retrouvent une seconde jeunesse, collant à merveille au monde mélancolique de De Kift. La musique reste cet assemblage de cuivres, de cordes en tout genre et de générosité dans le chant, cette fanfare débraillée tour à tour poignante ou valsante. Entre polka de fin de nuit, espagnolade démembrée, Tom Waits dépouillé et minimalisme débonnaire. On a vu de vieux couples s'enlacer pour moins que ça. Fini le baroque du précédent album Vier Voor Vier. Cet album fait corps, sans haut, sans bas, cohérent d'un morceau à l'autre. Un certain retour à un De Kift classique, sans exubérance (à l'image de la pochette /emballage qui pour une fois n'a rien de dingue même si ça reste au-desus de la moyenne), nécessitant un paquet d'écoutes pour que les compositions prennent vie et que, comme d'habitude, la magie opère. On peut regretter cette petite pointe de folie, des morceaux qui sortiraient du lot, cette retenue que la famille hollandaise, du père chanteur Ferry Heyne et principal instigateur de toutes les musiques au grand-père trompettiste en passant par le tonton batteur, à laquelle elle ne nous avait jamais habituée.

Quid de cette version française… Les échos de leur dernière venue à Rennes n'étaient guère favorables à ce chant en français trop présent. Ce qu'on aime chez De Kift par ici, c'est aussi ces consonances gutturales, ce chant batave qui fait parti intégrante du folklore de nos hollandais, cette pointe d'exotisme à laquelle on ne pige rien mais amplement suffisante pour s'immerger dans leur musique. Ce chant français n'a rien de mauvais. Une pointe d'accent bien sûr mais rien de gênant. Sauf que pour nous, pauvres français, cela donne tout de suite une touche chanson française entre Têtes Raides au pire (leurs parrains français) et Jacques Brel pour le meilleur. On perd de l'originalité dans l'affaire. Il faudrait en fait demander à un hollandais, un anglais ou un chinois, bref, un étranger, comment il ressent ce chant en français. L'exotisme, c'est pour eux même si il n'y a rien de rédhibitoire à l'écouter par chez nous. Après tout, si De Kift veux faire une percée plus conséquente en France, cette version va grandement aider et ce, sans vendre leur âme. De Kift, en VO ou en VF, reste De Kift et vaut largement mieux de toute façon que tous les groupes de baltringues qu'on se traîne chez nous. 7 est définitivement un très bon chiffre.

SKX (28/10/2007)





Extrait du livret (74 pages) :