Black Engine
Ku Klux Klowns - CD
Wallace records 2007

Voilà un groupe composé de membres au pedigree impeccable puisque Black Engine est la réunion de Zu et d'Eraldo Bernocchi -allez, un effort quoi : c'est l'un des rares types à avoir réussi à collaborer avec Mick Harris sans se brouiller définitivement avec lui- et puisque, lors de rares concert donnés cet été, l'ancien batteur de Napalm Death et démiurge de Scorn a même rejoint Black Engine sur scène, deux batteurs de la trempe d'Harris et de Battaglia en même temps cela devait être pour le moins impressionnant. Ok, je me calme : Mick Harris ne joue pas sur le disque.
Ku Klux Klowns est le premier album du groupe, chez Wallace comme il se doit et comme Igneo, très bon album de Zu, justement. Pourtant les comparaisons peuvent s'arrêter là car la musique de Black Engine est autrement plus compacte que celle du trio. Cela sent moins la freeture aussi. Je ne dis pas qu'il n'y a aucun de ces plans où tout par en vrille sans crier gare mais il n'y a pas que ça. Le point commun est assurément l'importance de la rythmique : dans Zu elle passe son temps à se saborder elle-même avant de se rattraper de justesse, chez Black Engine elle sait faire la même chose mais elle sait aussi tourner au monolithique et au massif. Lorsque la basse martèle ses lignes lourdes mais imparables et que la batterie dévie avec ses coups francs, offrant un écrin inflexible aux égrainages du saxophone baryton ou aux nappes distillées par la guitare, on n'est pas loin de la perfection en matière de désordre et de chaos. Car -mis à part Monno- il y a fort longtemps que je n'avais pas écouté un groupe capable d'être aussi lourd et malsain sans donner dans le doom répétitif et/ou maladif. Puis de partir dans quelque cavalcade particulièrement débridée et d'atterrir en roue libre dans la boue.
Il y a un corps ligoté et empaqueté sur la pochette de ce CD : la musique de Black Engine est un peu pareille, oppressante, pesante, étouffante. Mais elle est aussi inventive (quelques zigouigouis et traficotages électroniques dus au sieur Bernocchi par exemple) sans être démonstrative. Elle est d'une noirceur et d'un pessimisme sans virer à la névrose complaisante. Elle peut donner l'impression d'être improvisée sans faire dans le remplissage. Elle n'est jamais facile sans être élitiste. Elle fait parfois peur. Et franchement, tout ça, ça fait vraiment du bien.

Haz (12/10/2007)